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UNE NOUVELLE VISION DU MONDE

LA TRANSDISCIPLINARITÉ

Extrait du livre LA TRANSDISCIPLINARITÉ - Manifeste,

par Basarab Nicolescu

Éditions du Rocher, Col. "Transdisciplinarité", Monaco 1996

 

 

Le processus de déclin des civilisations est d'une grande complexité

et il plonge ses racines dans la plus totale obscurité.

Bien entendu, on peut trouver après coup de multiples explications

et rationalisations, sans parvenir à dissiper le sentiment d'un

irrationnel agissant au coeur même de ce processus.

Les acteurs d'une civilisation bien déterminée, des grandes masses

aux grands décideurs, même s'ils prennent plus ou moins conscience

du processus de déclin, semblent impuissants à arrêter la chute de

leur civilisation. Une chose est certaine : un grand décalage entre les

mentalités des acteurs et les nécessités internes de développement

d'un type de société, accompagne toujours la chute d'une

civilisation. Tout se passe comme si les connaissances et les savoirs

qu'une civilisation ne cesse d'accumuler ne pouvaient être intégrées

dans l'être intérieur de ceux qui composent cette civilisation.

Or, après tout, c'est l'être humain qui se trouve ou devrait

se trouver au centre de toute civilisation digne de ce nom.

 

La croissance sans précédent des savoirs à notre époque rend

légitime la question de l'adaptation des mentalités à ces savoirs.

L'enjeu est de taille car l'extension continue de la civilisation de

type occidental à l'échelle planétaire rendrait sa chute équivalente

à un incendie planétaire sans commune mesure avec les deux

premières guerres mondiales.

 

Pour la pensée classique il n'y a que deux solutions de sortie d'une

situation de déclin : la révolution sociale ou le retour à un supposé

"âge d'or".

 

La révolution sociale a déjà été expérimentée au cours du siècle qui

s'achève et ses résultats ont été catastrophiques. L'homme nouveau

n'était qu'un homme creux et triste. Quels que soient les

aménagements cosmétiques que le concept de "révolution sociale"

ne tardera de subir dans l'avenir, ils ne pourront pas effacer de

notre mémoire collective ce qui a été effectivement expérimenté.

 

Le retour à l'âge d'or n'a pas encore été essayé, pour la simple

raison que l'âge d'or n'a pas été retrouvé. Même si on suppose

que cet âge d'or a existé dans des temps immémoriaux, ce retour

devrait nécessairement s'accompagner d'une révolution intérieure

dogmatique , image en miroir de la révolution sociale. Les différents

intégrismes religieux qui couvrent la surface de la terre de leur

manteau noir sont un mauvais présage de la violence et du sang

qui pourraient jaillir de cette caricature de "révolution intérieure".

 

Mais, comme toujours, il y a une troisième solution.

Cette troisième solution fait l'objet du présent manifeste.

 

L'harmonie entre les mentalités et les savoirs présuppose que

ces savoirs soient intelligibles, compréhensibles. Mais une

compréhension peut-elle encore exister à l'ère du big bang

disciplinaire et de la spécialisation à outrance ?

 

Un Pic de la Mirandole à notre époque est inconcevable. Deux

spécialistes de la même discipline ont aujourd'hui du mal à

comprendre leurs propres résultats réciproques. Cela n'a rien de

monstrueux dans la mesure où c'est l'intelligence collective de la

communauté attachée à cette discipline qui la fait progresser, et

non pas un seul cerveau qui devrait forcément connaître tous les

résultats de tous ses collègues-cerveaux, ce qui est impossible.

Car il y a aujourd'hui des centaines de disciplines. Comment un

physicien théoricien des particules pourrait-il vraiment dialoguer

avec un neurophysiologiste, un mathématicien avec un poète, un

biologiste avec un économiste, un politicien avec un informaticien,

au-delà de généralités plus ou moins banales ? Et pourtant un

véritable décideur devrait pouvoir dialoguer avec tous à la fois. Le

langage disciplinaire est un barrage apparemment infranchissable

pour un néophyte. Et nous sommes tous les néophytes des autres.

La Tour de Babel serait-elle inévitable ?

 

Néanmoins, un Pic de la Mirandole à notre époque est concevable

dans la forme d'un superordinateur dans lequel on pourrait injecter

toutes les connaissances de toutes les disciplines.

Ce superordinateur pourrait tout savoir mais ne rien comprendre.

L'utilisateur de ce superordinateur ne serait pas dans une meilleure

situation que le superordinateur lui-même. Il aurait instantanément

accès à n'importe quel résultat de n'importe quelle discipline, mais il

serait incapable de comprendre leurs significations et encore moins

de faire des liens entre les résultats des différentes disciplines.

 

Ce processus de babélisation ne peut pas continuer sans mettre en

danger notre propre existence, car il signifie qu'un décideur devient,

malgré lui, de plus en plus incompétent. Les défis majeurs de notre

époque, comme par exemple les défis d'ordre éthique, réclament

de plus en plus de compétences. Mais la somme des meilleurs

spécialistes dans leurs domaines ne peut engendrer, de toute

évidence, qu'une incompétence généralisée, car la somme des

compétences n'est pas la compétence : sur le plan technique,

l'intersection entre les différents domaines du savoir est un

ensemble vide. Or, qu'est-ce qu'un décideur, individuel ou collectif,

sinon celui qui est capable de prendre en compte toutes les données

du problème qu'il examine ?

 

Le besoin indispensable de liens entre les différentes disciplines

s'est traduit par l'émergence, vers le milieu du XXème siècle, de

la pluridisciplinarité et de l'interdisciplinarité.

 

La pluridisciplinarité concerne l'étude d'un objet d'une seule et même

discipline par plusieurs disciplines à la fois . Par exemple, un tableau

de Giotto peut être étudié par le regard de l'histoire de l'art croisé

avec celui de la physique, la chimie, l'histoire des religions, l'histoire

de l'Europe et la géométrie. Ou bien, la philosophie marxiste peut

être étudiée par le regard croisé de la philosophie avec la physique,

l'économie, la psychanalyse ou la littérature. L'objet sortira ainsi

enrichi du croisement de plusieurs disciplines. La connaissance de

l'objet dans sa propre discipline est approfondie par un apport

pluridisciplinaire fécond. La recherche pluridisciplinaire apporte un

plus à la discipline en question (l'histoire de l'art ou la philosophie,

dans nos exemples), mais ce "plus" est au service exclusif de cette

même discipline. Autrement dit, la démarche pluridisciplinaire

déborde les disciplines mais sa finalité reste inscrite dans le cadre

de la recherche disciplinaire.

 

L'interdisciplinarité a une ambition différente de celle de la

pluridisciplinarité. Elle concerne le transfert des méthodes d'une

discipline à l'autre . On peut distinguer trois degrés de

l'interdisciplinarité : a) un degré d'application. Par exemple, les

méthodes de la physique nucléaire transférées à la médecine

conduisent à l'apparition de nouveaux traitements du cancer ;

b) un degré épistémologique. Par exemple, le transfert des

méthodes de la logique formelle dans le domaine du droit génère

des analyses intéressantes dans l'épistémologie du droit ;

c) un degré d'engendrement de nouvelles disciplines. Par exemple,

le transfert des méthodes de la mathématique dans le domaine de la

physique a engendré la physique mathématique, de la physique des

particules à l'astrophysique - la cosmologie quantique, de la

mathématique aux phénomènes météorologiques ou ceux de la

bourse - la théorie du chaos, de l'informatique dans l'art - l'art

informatique. Comme la pluridisciplinarité, l'interdisciplinarité

déborde les disciplines mais sa finalité reste aussi inscrite dans la

recherche disciplinaire. Par son troisième degré, l'interdisciplinarité

contribue même au big bang disciplinaire.

 

La transdisciplinarité concerne, comme le préfixe "trans" l'indique,

ce qui est à la fois entre les disciplines, à travers les différentes

disciplines et au delà de toute discipline.

Sa finalité est la compréhension du monde présent ,

dont un des impératifs est l'unité de la connaissance.

 

Y a-t-il quelque chose entre et à travers les disciplines et au delà de

toute discipline ? Du point de vue de la pensée classique il n'y a rien,

strictement rien. L'espace en question est vide, complètement vide,

comme le vide de la physique classique. Même si elle renonce à la

vision pyramidale de la connaissance, la pensée classique considère

que chaque fragment de la pyramide, engendré par le big bang

disciplinaire, est une pyramide entière; chaque discipline clame que

le champ de sa pertinence est inépuisable. Pour la pensée classique,

la transdisciplinarité est une absurdité car elle n'a pas d'objet.

En revanche pour la transdisciplinarité, la pensée classique n'est

pas absurde mais son champ d'application est reconnu comme étant

restreint.

 

En présence de plusieurs niveaux de Réalité, l'espace entre les

disciplines et au delà des disciplines est plein, comme le vide

quantique est plein de toutes les potentialités: de la particule

quantique aux galaxies, du quark aux éléments lourds qui

conditionnent l'apparition de la vie dans l'Univers.

 

La structure discontinue des niveaux de Réalité détermine la

structure discontinue de l'espace transdisciplinaire, qui, à son tour,

explique pourquoi la recherche transdisciplinaire est radicalement

distincte de la recherche disciplinaire, tout en lui étant

complémentaire. La recherche disciplinaire concerne, tout au plus,

un seul et même niveau de Réalité; d'ailleurs, dans la plupart des

cas, elle ne concerne que des fragments d'un seul et même niveau

de Réalité. En revanche, la transdisciplinarité s'intéresse à la

dynamique engendrée par l'action de plusieurs niveaux de Réalité

à la fois. La découverte de cette dynamique passe nécessairement

par la connaissance disciplinaire. La transdisciplinarité, tout en

n'étant pas une nouvelle discipline ou une nouvelle hyperdiscipline,

se nourrit de la recherche disciplinaire, qui, à son tour, est éclairée

d'une manière nouvelle et féconde par la connaissance

transdisciplinaire. Dans ce sens, les recherches disciplinaires et

transdisciplinaires ne sont pas antagonistes mais complémentaires.

 

Les trois piliers de la transdisciplinarité - les niveaux de Réalité, la

logique du tiers inclus et la complexité - déterminent la méthodologie

de la recherche transdisciplinaire .

 

Un saisissant parallèle existe entre les trois piliers de la

transdisciplinarité et les trois postulats de la science moderne.

 

Les trois postulats méthodologiques de la science moderne sont

restés inchangés de Galilée jusqu'à nos jours, malgré l'infinie

diversité des méthodes, théories et modèles qui ont traversé

l'histoire des différentes disciplines scientifiques. Mais une seule

science satisfait entièrement et intégralement les trois postulats:

la physique. Les autres disciplines scientifiques ne satisfont que

partiellement les trois postulats méthodologiques de la science

moderne. Toutefois, l'absence d'une formalisation mathématique

rigoureuse de la psychologie, de l'histoire des religions et d'une

multitude d'autres disciplines ne conduit pas à l'élimination de ces

disciplines du champ de la science. Même les sciences de pointe,

comme la biologie moléculaire, ne peuvent pas prétendre, tout du

moins pour l'instant, à une formalisation mathématique aussi

rigoureuse que celle de la physique. Autrement dit, il y a des degrés

de disciplinarité en fonction de la prise en compte, plus ou moins

complète, des trois postulats méthodologiques de la science

moderne.

 

De même, la prise en compte plus ou moins complète des trois

piliers méthodologiques de la recherche transdisciplinaire engendre

différents degrés de transdisciplinarité.

La recherche transdisciplinaire correspondant à un certain degré

de transdisciplinarité s'approchera plutôt de la multidisciplinarité

(comme dans le cas de l'éthique); celle à un autre degré - de

l'interdisciplinarité (comme dans le cas de l'épistémologie);

et celle encore à un autre degré - de la disciplinarité.

 

La disciplinarité, la pluridisciplinarité, l'interdisciplinarité et la

transdisciplinarité sont les quatre flèches d'un seul et même arc:

celui de la connaissance.

 

Comme dans le cas de la disciplinarité, la recherche

transdisciplinaire n'est pas antagoniste mais complémentaire de

la recherche pluri et interdisciplinaire. La transdisciplinarité est

néanmoins radicalement distincte de la pluridisciplinarité et de

l'interdisciplinarité, de par sa finalité, la compréhension du monde

présent, qu'il est impossible d'inscrire dans la recherche disciplinaire.

La finalité de la pluri et de l'interdisciplinarité est toujours la

recherche disciplinaire. Si la transdisciplinarité est si souvent

confondue avec l'interdisciplinarité et la pluridisciplinarité (comme,

d'ailleurs, l'interdisciplinarité est si souvent confondue avec la

pluridisciplinarité), cela s'explique en majeure partie par le fait que

toutes les trois débordent les disciplines. Cette confusion est très

nocive dans la mesure où elle occulte les finalités différentes de ces

trois nouvelles approches.

 

Tout en reconnaissant le caractère radicalement distinct de la

transdisciplinarité par rapport à la disciplinarité, la pluridisciplinarité

et l'interdisciplinarité, il serait extrêmement dangereux d'absolutiser

cette distinction, auquel cas la transdisciplinarité serait vidée de tout

son contenu et son efficacité dans l'action réduite à néant.

 

Le caractère complémentaire des approches disciplinaire,

pluridisciplinaire, interdisciplinaire et transdisciplinaire est

mis en évidence d'une manière éclatante, par exemple, dans

l'accompagnement des mourants. Cette démarche relativement

nouvelle de notre civilisation est d'une extrême importance, car, en

reconnaissant le rôle de notre mort dans notre vie, nous découvrons

des dimensions insoupçonnées de la vie elle-même.

L'accompagnement des mourants ne peut faire l'économie d'une

recherche transdisciplinaire dans la mesure où la compréhension du

monde présent passe par la compréhension du sens de notre vie et

du sens de notre mort en ce monde qui est nôtre.

 

 

Basarab Nicolescu

Centre International de Recherches et d’Études Transdisciplinaires / CIRET

http://perso.club-internet.fr/nicol/ciret/vision.htm

http://perso.club-internet.fr/nicol/ciret/

E-mail : nicol@club-internet.fr

 

 

 

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A NEW VISION OF THE WORLD

THE TRANSDISCIPLINARITY

 

Summary from the book LA TRANSDISCIPLINARITÉ - Manifeste,

Basarab Nicolescu

Éditions du Rocher, Col. "Transdisciplinarité", Monaco 1996

 

 

The process of the decline of civilizations is one of enormous

complexity and its roots lie deeply buried in the most profound

obscurity. Of course one can find multiple after the fact explanations

and rationalizations without ever successfully dispelling the feeling

that there is an irrational element at work in the very heart of the

process. From the great masses to the great decision makers, the

actors in a very well-defined civilization, even if they become more

or less aware of the processes of decline, appear powerless to stop

the fall of their civilization.

 

One thing is certain: a great unbalance between the mentalities of

the actors and the inner needs of the development of a particular

type of society always accompanies the fall of a civilization. Although

a civilization never stops proliferating new knowledge, it is as if that

knowledge can never be integrated within the interior being of those

who belong to this civilization. And after all, it is the human being

who must be placed in the center of any civilization worthy of the

name.

 

The unprecedented increase of knowledge in our era renders the

question of how to adapt our mentality to this knowledge a legitimate

challenge. The challenge is enormous because the influence of the

Western style of civilization throughout the planet is so pervasive

that its downfall would be the equivalent of a planetary conflagration

far exceeding the destruction which we suffered in the two world

wars.

 

Within the framework of classical thought, the only existing solutions

for escape from a declining situation are a social revolution or a

return to a supposedly "Golden Age".

 

Social revolution has already been experienced in the course of

the century now coming to an end and its results have been

catastrophic. The New Man turned out to be only a sad, empty man.

No matter what cosmetic ameliorations the concept of "social

revolution" undergoes they will never be able to erase from our

collective memory that which has actually been experienced.

 

The return to a Golden Age has not yet been tried, for the simple

reason that the existence of a Golden Age in the first place has not

been established. Even if one supposes that a Golden Age did exist

in time immemorial, such a return would necessarily have to be

accompanied by an interior dogmatic revolution , the mirror image

of the social revolution. The different religious fundamentalisms

which cover the surface of the earth with their black mantle are an

evil portent of the violence and blood which would burst forth from

this caricature of authentic "interior revolution."

 

As always, there is a third solution.

This third solution constitutes the object of the present manifesto.

 

Harmony between mentalities and knowledge presupposes that

these known facts would be intelligible, comprehensible. But can

such understanding exist in the era of the disciplinary big bang and

relentless specialization?

 

In our time, a Pico della Mirandola is inconceivable. Today, two

specialists in the same discipline must make a serious effort in order

to understand their respective results. There is nothing especially

troubling about this in so far as it is the collective intelligence of the

community attached to this discipline which makes it progress, not

simply a single brain which must necessarily know all the results of

all his colleagues' brains, clearly an impossibility. Today there are

hundreds of disciplines. How can a theoretical particle physicist truly

dialogue with a neurophysiologist, a mathematician with a poet,

a biologist with an economist, a politician with a computer

programmer, beyond mouthing more or less trivial generalities?

Yet, a true decision-maker must be able to dialogue with all of them

at once. Disciplinary language is an apparently insurmountable

barrier for a neophyte, and each of us is a neophyte in some area.

Is a modern tower of Babel inevitable?

 

Perhaps a Pico della Mirandola in our time could be conceivable if he

took the form of a supercomputer into which one could load all the

known data which has been generated by all existing disciplines.

This supercomputer would be capable of knowing everything while

understanding nothing. Its user would be no better off than the

supercomputer itself. The user would have immediate access to any

results from any discipline, but would be incapable of understanding

their meanings, still less of making connections between the results

of different disciplines.

 

This process of "Babelization" cannot continue without putting our

own existence into danger because a decision-maker becomes

increasingly more incompetent regardless of his or her intention.

Without exception, each of the major challenges of our era - for

example, the challenge of formulating an ethics adapted to the

contemporary world - require more and more compe tencies.

However, it is obvious that even a group comprised of the best

specialists from all the various disciplines would only be able to

develop one generalized incompetence, for the simple reason that

the sum total of competencies is not competence: on the technical

level, the intersection between different domains of knowledge is

an empty ensemble. Now, what is a decision maker, individual or

collective, if not capable of taking into account all the givens of the

problem being examined?

 

The indispensable need for bridges between the different disciplines

is attested to by the emergence of pluridisciplinarity and

interdisciplinarity around the middle of the 20th century.

 

Pluridisciplinarity concerns studying a research topic not in only one

discipline but in several at the same time . For example, a painting

by Giotto can be studied not only within art history but within history

of religions, European history, and geometry. Or else Marxist

philosophy can be studied with a view toward blending philosophy

with physics, economics, psychoanalysis or literature. The topic in

question will ultimately be enriched by blending the perspectives of

several disciplines. Moreover, our understanding of the topic in

terms of its own discipline is deepened by a fertile multidisciplinary

approach. Multidisciplinarity brings a plus to the discipline in question

(the history of art or philosophy in our examples), but we must

remember that this "plus" is always in the exclusive service of the

home discipline. In other words, the multidisciplinary approach

overflows disciplinary boundaries while its goal remains limited

to the framework of disciplinary research .

 

Interdisciplinarity has a different goal from multidisciplinarity.

It concerns the transfer of methods from one discipline to another.

One can distinguish three degrees of interdisciplinarity:

a)   a degree of application. For example, when the methods of

nuclear physics are transferred to medicine it leads to the

appearance of new treatments for cancer;

b)   an epistemological degree. For example, transferring methods

of formal logic to the area of general law generates some interesting

analyses of the epistemology of law;

c)    a degree of the generation of new disciplines. For example,

when methods from mathe matics were transferred to physics

mathematical physics was generated, and when they were

transferred to meterological phenomena or stock market processes

they generated chaos theory; transferring methods from particle

physics to astrophysics produced quantum cosmology; and from the

transfer of computer methods to art computer art was derived. Like

pluridisciplinarity, interdisciplinarity overflows the disciplines but ist

goal still remains within the framework of disciplinary research.

It is through the third degree that interdisciplinarity contributes to

the disciplinary big bang.

 

As the prefix "trans" indicates, transdisciplinarity concerns that which

is at once between the disciplines, across the different disciplines,

and beyond all discipline. Its goal is the understanding of the present

world , of which one of the imperatives is the unity of knowledge.

 

Is there something between and across the disciplines and beyond

all disciplines? From the point of view of classical thought there is

nothing, strictly nothing: the space in question is empty, completely

empty, like the vacuum of classical physics. Even if it renounces the

pyramidal vision of knowledge, classical thought considers each

fragment of the pyramid which is generated by the disciplinary big

bang as an entire pyramid; each discipline claims that it is sufficient

unto itself. For classical thought, transdisciplinarity appears absurd

because it does not appear to have an object. In contrast, within the

framework of transdisciplinarity, classical thought does not appear

absurd; rather, it simply appears to have a restricted sphere of

applicability.

 

In the presence of several levels of Reality the space between

disciplines and beyond disciplines is full just as the quantum vacuum

is full of all potentialities: from the quantum particle to the galaxies,

from the quark to the heavy elements which condition the

appearance of life in the universe. The discontinuous structure of

the levels of Reality determines the discontinuous structure of

transdisciplinary space , which in turn explains why transdisciplinary

research is radical ly distinct from disciplinary research, even while

being entirely complementary. Disciplinary research concerns, at

most, one and the same level of Reality ; moreover, in most cases,

it only concerns fragments of one level of Reality. On the contrary,

transdisciplinarity concerns the dynamics engendered by the action

of several levels of Reality at once . The discovery of these

dynamics necessarily passes through disciplinary knowledge. While

not a new discipline or a new superdiscipline, transdisciplinarity is

nourished by disciplinary research; in turn, disciplinary research is

clarified by transdisciplinary knowledge in a new, fertile way.

In this sense, disciplinary and transdisciplinary research are

not antagonistic but complementary.

 

The three pillars of transdisciplinarity - levels of Reality, the logic of

the included middle, and complexity - determine the methodology of

transdisciplinary research.

 

There is an interesting parallel between the three pillars of

transdisciplinarity and the three postulates of modern science.

 

In spite of an almost infinite diversity of methods, theories and

models which have traversed the history of different scientific

disciplines, the three methodological postulates of modern science

have remained unchanged from Galileo until our day. Only one

science has entirely and integrally satisfied the three postulates:

physics. The other scientific disciplines only partially satisfy the three

methodological postulates of modern science. However, the absence

of rigorous mathematical formalization in psychology, history of

religions, and a multitude of other disciplines does not lead to the

elimination of these disciplines from the field of science. At least for

the moment, not even an exact science like molecular biology, can

claim a mathematical formalization as rigorous as that of phys ics.

In other words, there are degrees of disciplinarity which can

respectively take into account more or less completely the three

methodological postulates of modern science.

 

Likewise, the process of more or less completely taking account

of the three methodological pillars of transdisciplinary research

generates different degrees of transdisciplinarity. Transdisciplinary

research which corresponds to a certain degree of transdisciplinarity

will be closer to multidisciplinarity (as in the case of ethics); one

which corresponds to another degree will be closer to

interdisciplinarity (as in the case of epistemology); and that

corresponding to yet another degree will be closer to disciplinarity.

 

Disciplinarity, multidisciplinarity, interdisciplinarity and

transdisciplinarity are like four arrows shot from but a single bow:

knowledge.

 

As in the case of disciplinarity, transdisciplinary research is

not antagonistic but complementary to multidisciplinarity and

interdisciplinarity research. Transdisciplinarity is nevertheless

radically distinct from multidisciplinarity and interdisciplinarity

because of its goal, the understanding of the present world, which

cannot be accomplished in the framework of disciplinary research.

The goal of multidisciplinarity and interdisciplinarity always remains

within the framework of disciplinary research. If transdisciplinarity is

often confused with interdisciplinarity and multidisciplinarity (and by

the same token, we note that interdisciplinarity is often confused

with multidisciplinarity) this is explained in large part by the fact that

all three overflow disciplinary boundaries. This confusion is very

harmful to the extent that it functions to hide the different goals

of these three new approaches.

 

Although we recognize the radically distinct character of

transdisciplinarity in relation to disciplinarity, multidisciplinarity, and

interdisciplinarity, it would be extremely dangerous to absolutize this

distinction, in which case transdisciplinarity would be emptied of all

its contents and its efficacy in action reduced to nothing.

 

The complementary character of disciplinary, multidisciplinary,

interdisciplinary, and transdisciplinary approaches is demonstrated

in a stunning way, for example, by the accompaniment of the dying.

This relatively new approach to the dying is extremely important

because in recognizing the role of our death in our life, we discover

hitherto unsuspected dimensions of life itself. Accompanying the

dying is greatly enriched by transdisciplinary research because

deeper understanding of the present world must pass through

deeper understanding of the meaning of our life and of our death

in this world which is ours.

 

 

Basarab Nicolescu

International Center for Transdisciplinary Research / CIRET

http://perso.club-internet.fr/nicol/ciret/

http://perso.club-internet.fr/nicol/ciret/english/visionen.htm

E-mail : nicol@club-internet.fr

 

 

 

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LA TRANSDISCIPLINARIEDAD

UNA NUEVA VISIÓN DEL MUNDO

 

Extracto del libro LA TRANSDISCIPLINARIEDAD - Manifiesto,

de Basarab Nicolescu

Éditions du Rocher, Col. Transdisciplinarité, Mónaco 1996

 

 

El proceso de decadencia de las civilizaciones es de una gran

complejidad y tiene sus raíces en la más completa obscuridad.

Por supuesto, se pueden encontrar a posteriori, múltiples

explicaciones y racionalizaciones sin llegar a disipar el sentimiento

de una irracionalidad que se oculta en el corazón mismo de ese

proceso. Los actores de una civilización bien determinada, desde

las grandes masas a los grandes dirigentes, se ven impotentes para

detener la caída de su civilización independientemente del nivel

de conciencia que tengan del proceso de decadencia. Una cosa es

cierta: una gran diferencia entre las mentalidades de los actores

y las necesidades internas de desarrollo de un tipo de sociedad

acompaña siempre la caída de una civilización. Todo pasa como si

los conocimientos y los saberes que una civilización no cesa de

acumular no pueden integrarse en el ser interior de aquellos que

componen dicha civilización. Ello a pesar de que el ser humano

debería encontrarse en el centro de toda civilización digna de ese

nombre.

 

El crecimiento sin precedente de los saberes en nuestra época

vuelve legítima la cuestión de la adaptación de las mentalidades a

esos saberes. El juego es de grandes proporciones porque dada

la extensión continua de la civilización de tipo occidental a escala

planetaria su caída sería equivalente a un incendio interplanetario

sin medida común con las dos guerras mundiales.

 

Para el pensamiento clásico no hay más que dos soluciones posibles

para salir de una situación de decadencia: la revolución social o el

retorno a la supuesta “edad de oro".

 

La revolución social ha sido experimentada en el curso del siglo que

termina y sus resultados han sido catastróficos. El hombre nuevo no

era más que un hombre vacío y triste. Cualquiera que sean los

arreglos cosméticos que no tardará en sufrir en el futuro la

"revolución social", no podrán borrar de nuestra memoria

colectiva lo que ha sido efectivamente experimentado.

 

El regreso a la edad de oro no se ha ensayado todavía por la simple

razón que la edad de oro no ha sido encontrada. Aún si se llega a

suponer que dicha edad de oro existió en tiempos inmemoriables,

ese retorno debería acompañarse de una revolución interior

dogmática , imagen retrospectiva de la revolución social. Los

diferentes integrismos religiosos que cubren la superficie de la tierra

con su manto negro son un presagio funesto de la violencia y la

sangre que podría brotar de esa caricatura de "revolución interior".

 

Pero, como siempre, hay una tercera solución.

Esa tercera solución es el tema del presente manifiesto.

 

La armonía entre las mentalidades y los saberes presupone que

esos saberes sean inteligibles, comprensibles.

¿Pero puede aún existir una comprensión en la era del gran

"bang" disciplinar y de la especialización exagerada?.

 

Un Pic de la Mirandole en nuestra época es inconcebible. Dos

especialistas de la misma disciplina tienen dificultad en entender,

hoy día, sus propios resultados recíprocos. Eso no tiene nada de

monstruoso en la medida en la que es la inteligencia colectiva de la

comunidad apegada a esa disciplina la que hace progresar y no solo

es un cerebro el que debe por fuerza conocer todos los resultados

de todos esos cerebros-colegas, situación ésta por demás imposible.

Por otra parte debido a que hoy en día hay centenares de disciplinas

uno se pregunta. ¿cómo podría un teorizante en física de las

partículas dialogar verdaderamente con un neurofisiólogo;

un matemático con un poeta, un biólogo con un economista,

un político con un especialista en informática, más allá de las

generalidades más o menos banales? Y sin embargo un verdadero

dirigente debe poder dialogar con todos a la vez. El lenguaje

disciplinario es una barrera aparentemente infranqueable para un

neófito. Y todos somos neófitos de los otros.

¿La Torre de Babel será inevitable?

 

No obstante, un Pic de Mirandole en nuestra época es concebible

como una supercomputadora a la cual se podría alimentar todos los

conocimientos de todas las disciplinas. Esa supercomputadora podría

saber todo pero no entender nada. El que utilizara dicha

supercomputadora no estaría en mejor situación que la

supercomputadora misma. Tendría acceso instantáneo a no importa

cual resultado de no importa cual disciplina pero no sería capaz de

entender sus significados y aún menos formar lazos de unión entre

los resultados de las diferentes disciplinas.

 

Ese proceso de babelización no puede continuar sin poner en peligro

nuestra propia existencia porque significa que un dirigente se vuelve

aún sin querer, más y más incompetente. Los desafíos mayores de

nuestra época, como por ejemplo los desafíos éticos, requieren

capacidades más y más amplias. Pero la suma de los mejores

especialistas en sus dominios no puede engendrar, evidentemente,

más que incompetencia generalizada, porque el total de las

capacidades no es la capacidad: en plan técnico, la intersección

entre los diferentes campos del saber es un conjunto vacío.

Ahora bien, ¿qué es un dirigente individual o colectivo sino aquel

que es capaz de tener en cuenta todos los elementos del problema

que examina?

 

La necesidad indispensable de entrelazar las diferentes disciplinas

se manifiesta en el surgimiento, hacia la mitad del siglo veinte, de

la pluridisciplinariedad y de la interdisciplinariedad.

 

La pluridisciplinariedad consiste en el estudio del objeto de una sola

y misma disciplina por medio de varias disciplinas a la vez. Por

ejemplo, un cuadro de Giotto puede estudiarse por la historia del

arte alternando con la física, la química, la historia de las religiones,

la historia de Europa y la geometría. O bien, la filosofía marxista

puede estudiarse por la filosofía alternando con la física, la

economía, el psicoanálisis o la literatura. El objeto saldrá así

enriquecido por la convergencia de varias disciplinas.

El conocimiento del objeto dentro de su propia disciplina se

profundiza con la aportación pluridisciplinaria fecunda.

La investigación pluridisciplinaria en consecuencia aporta un "más" a

la disciplina en cuestión (la historia del arte o la filosofía en nuestros

ejemplos), pero ese "más" está al servicio exclusivo de esa misma

disciplina. Dicho de otro modo, la gestión pluridisciplinaria sobrepasa

las disciplinas pero su finalidad queda inscrita en el marco de la

investigación disciplinaria.

 

La interdisciplinariedad tiene una mirada diferente. Concierne a la

transferencia de métodos de una disciplina a otra. Se pueden

distinguir tres grados de interdisciplinariedad:

a)   un grado de aplicación. Por ejemplo, los métodos de la física

nuclear transferidos a la medicina conducen a la aparición de nuevos

tratamientos del cáncer;

b)   un grado epistemológico. Por ejemplo, la transferencia de los

métodos de la lógica formal en el campo del derecho genera análisis

interesantes en la epistemología del derecho;

c)    un grado de concepción de nuevas disciplinas. Por ejemplo, la

transferencia de los métodos de la matemática en el campo de la

física ha engendrado la físico-matemática, de la física de las

partículas a la astrofísica -la cosmología cuántica, de la matemática

a los fenómenos meteorológicos o los de la bolsa -la teoría del caos,

de la informática en el arte- el arte informático.

Como la pluridisciplinariedad, la interdisciplinariedad sobrepasa las

disciplinas pero su finalidad queda inscrita en la investigación

disciplinaria. Por su tercer grado, la interdisciplinariedad contribuye

al gran "bang" disciplinario.

 

La transdisciplinariedad por su parte concierne, como lo indica el

prefijo "trans", a lo que simultáneamente es entre las disciplinas a

través de las diferentes disciplinas y más allá de toda disciplina.

Su finalidad es la comprensión del mundo presente, uno de cuyos

imperativos es la unidad del conocimiento.

 

¿Hay algo entre y a través de las disciplinas y más allá de toda

disciplina? Desde el punto de vista del pensamiento clásico no hay

nada, estrictamente nada. El espacio en cuestión está vacío, como el

vacío de la física clásica. Aún cuando renuncia a la visión piramidal

del conocimiento, el pensamiento clásico considera que cada

fragmento de la pirámide por el gran "bang" disciplinario es una

pirámide entera; cada disciplina pretende que el campo que le

pertenece es inagotable. Para el pensamiento clásico la

transdisciplinariedad es un absurdo porque no tiene objeto. En

cambio para la transdisciplinariedad el pensamiento clásico no es

absurdo pero su campo de aplicación es considerado restringido.

 

En presencia de varios niveles de Realidad, el espacio entre las

disciplinas y más allá de las disciplinas está lleno, como el vacío

cuántico está lleno de todas las potencialidades: desde la partícula

cuántica a las galaxias, del quarzo a los elementos pesados que

preparan la aparición de la vida en el Universo.

 

La estructura discontinua de los niveles de Realidad determina la

estructura discontinua del espacio transdisciplinario que, a su vez,

explica por qué la investigación transdisciplinaria es radicalmente

distinta a la investigación disciplinaria, siéndole sin embargo

complementaria. La investigación disciplinaria concierne más o

menos a un solo y mismo nivel de Realidad , por otra parte, en la

mayoría de los casos no concierne más que a los fragmentos de un

solo y mismo nivel de Realidad. En cambio la transdisciplinariedad

se interesa en la dinámica que se engendra por la acción simultánea

de varios niveles de Realidad. El descubrimiento de dicha dinámica

pasa necesariamente por el conocimiento disciplinario.

La transdisciplinariedad, aunque no siendo una nueva disciplina o

una nueva hiperdisciplina se nutre de la investigación disciplinaria la

cual a su vez se aclara de una manera nueva y fecunda por medio

del conocimiento transdisciplinario.

En ese sentido las investigaciones disciplinarias y transdisciplinarias

no son antagónicas, son complementarias.

 

Los tres pilares de la transdiciplinariedad -los niveles de Realidad,

la lógica del tercero incluido y la complejidad - determinan

la metodología de la investigación transdisciplinaria.

 

Existe un paralelo sorprendente entre los tres pilares de la

transdisciplinariedad y los tres postulados de la ciencia moderna.

 

Los tres postulados metodológicos de la ciencia moderna han

permanecido sin cambios desde galileo hasta nuestros días, a

pesar de la infinidad de métodos, teorías y modelos por los que han

atravesado la historia de las diferentes disciplinas científicas. Pero

solo una ciencia satisface enteramente los tres postulados: la física.

Las otras disciplinas científicas satisfacen solo parcialmente los tres

postulados metodológicos de la ciencia moderna. Sin embargo la

ausencia de una formalización matemática rigurosa de la psicología,

de la historia de las religiones y de una multitud de otras disciplinas

no llevan a la eliminación de dichas disciplinas del campo de la

ciencia. Aún las ciencias de punta como la biología molecular, no

pueden pretender por el momento, al menos, una formalización

matemática tan rigurosa como la física. Dicho de otra manera hay

grados de disciplinariedad en función de que se tome en cuenta,

más o menos de manera completa, los tres postulados

metodológicos de la ciencia moderna.

 

Igualmente, el tomar en cuenta de manera más o menos completa

los tres pilares metodológicos de la investigación engendra

diferentes grados de transdisciplinariedad. La investigación

transdisciplinaria correspondiente a un cierto grado de

transdisciplinariedad se aproxima más bien a la multidisciplinariedad

(como es el caso de la ética); a la de otro grado - el de la

interdisciplinariedad (como en el caso de la epistemología)-;

y aún a otro grado el de la disciplinariedad.

 

La disciplinariedad, la pluridisciplinariedad, la interdisciplinariedad y

la transdisciplinariedad son las cuatro flechas de un solo y mismo

arco: el del conocimiento.

 

Como en el caso de la disciplinariedad, la investigación

transdisciplinaria no es antagonista sino complementaria a la

investigación pluri e interdisciplinaria. La transdisciplinariedad es

sin embargo radicalmente distinta a la pluridisciplinariedad y a la

interdisciplinariedad, por su finalidad, la comprensión del mundo

presente, que es imposible inscribir en la investigación disciplinaria.

La finalidad de la pluri y de la interdisciplinariedad es siempre la

investigación disciplinaria. Si la transdisciplinariedad es con

frecuencia confundida con la interdisciplinariedad y la

pluridisciplinariedad (como por otra parte, la interdisciplinariedad

es frecuentemente confundida con la pluridisciplinariedad) esos se

explica en parte por el hecho de que las tres desbordan las

disciplinas. Esta confusión oculta las diferentes finalidades de

estas tres nuevas aproximaciones.

 

Absolutizar el carácter radicalmente distinto de la

transdisciplinaridad en relación a la disciplinariedad,

la pluridisciplinariedad y la interdisciplinariedad, es extremadamente

peligroso ya que la transdisciplinariedad sería vaciada de todo su

contenido y su eficacia en la acción reducida a la nada.

 

El carácter complementario de las diversas aproximaciones, la

disciplinaria, la pluridisciplinaria, interdisciplinaria y transdisciplinaria

se pone en evidencia de una manera clara, por ejemplo, en el

acompañamiento de los moribundos. Este paso relativamente nuevo

de nuestra civilización es de suma importancia, porque, al reconocer

el papel de nuestra muerte en nuestra vida, descubrimos

dimensiones insospechadas de la vida misma. El acompañamiento

de los moribundos no puede ahorrarse una investigación

transdisciplinaria en la medida en que la comprensión del mundo

presente pasa por la comprensión del sentido de nuestra vida y

del sentido de nuestra muerte en este mundo que es el nuestro.

 

Traducción del Francés

Consuelo Falla Garmilla

Escuela Nacional de Trabajo Social

Universidad Nacional Autonoma de México

 

Basarab Nicolescu

Centro Internacional de Investigación y Estudios Transdisciplinares / CIRET

http://perso.club-internet.fr/nicol/ciret/espagnol/visiones.htm

http://perso.club-internet.fr/nicol/ciret/

E-mail : nicol@club-internet.fr

 

 

 

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O NOUÃ VIZIUNE ASUPRA LUMII

TRANSDISCIPLINARITATEA

 

 

Extras din cartea TRANSDISCIPLINARITATE - Manifest,

de Basarab Nicolescu

Editura Polirom, Iasi, România,

 

 

Declinul civilizatiilor este un proces de o mare complexitate si care

isi are rãdãcinile în negurile cele mai profunde. Bineînteles, post-

factum se pot gãsi multiple interpretãri si rationalizãri, fãrã însã a

reusi sã se risipeascã sentimentul existentei unui irational care se

manifestã în chiar centrul acestui proces. Actorii unei civilizatii precis

determinate - de la marile mase la marii factori decizionali -, chiar

dacã sunt mai mult sau mai putin constienti de acest declin, par

neputinciosi în a-i opri decãderea. Un lucru este cert : un mare

decalaj între mentalitãtile actorilor si necesitãtile interne de

dezvoltare a unui anume tip de societate însoteste întotdeauna

decãderea unei civilizatii. Totul se petrece ca si cum cunostintele si

învãtãturile pe care o civilizatie nu înceteazã sã le acumuleze nu ar

putea fi integrate în fiinta interioarã a celor ce compun acea

civilizatie. Ori, în definitiv, fiinta umanã este cea care se aflã sau ar

trebui sã se afle în centrul oricãrei civilizatii demne de acest nume.

 

Prin cresterea fãrã precedent a cunostintelor în epoca noastrã,

capãtã legitimitate problema adaptãrii mentalitãtilor la aceste

cunostinte. Miza este considerabilã cãci extinderea continuã a

civilizatiei de tip occidental la scarã planetarã ar face ca prãbusirea

sa sã echivaleze cu un incendiu planetar de neegalat cu primele

douã rãzboaie mondiale.

 

Pentru gîndirea clasicã nu existã decît douã solutii de iesire dintr-o

situatie de declin: revolutia socialã ori întoarcerea la o presupusã

"vîrstã de aur".

 

Revolutia socialã a fost deja experimentatã în decursul secolului ce

tocmai se sfîrseste iar rezultatele au fost catastrofale. Omul nou nu

era decît o fiintã gãunoasã si tristã. Indiferent de cosmetizãrile

conceptului de "revolutie socialã", ce nu vor întîrzia sã aparã în

viitor, acestea nu vor putea sterge din memoria noastrã colectivã

ceea ce s-a experimentat efectiv.

 

Intoarcerea la o vîrstã de aur nu a fost încã încercatã, pentru simplul

motiv cã vîrsta de aur nu a fost regãsitã. Chiar dacã se presupune

cã aceastã vîrstã de aur ar fi existat în vremuri imemoriale,

întoarcerea ar trebui în mod necesar sã fie însotitã de o revolutie

dogmaticã interioarã, imaginea în oglindã a revolutiei sociale.

Diferitele fundamentalisme religioase care-si întind mantalele negre

peste întregul glob terestru reprezintã un rãu semn prevestitor al

violentei si sîngelui ce ar putea tîsni din aceastã caricaturã de

"revolutie interioarã".

 

Dar, ca întotdeauna, existã o a treia solutie.

Aceastã a treia solutie face obiectul prezentului manifest.

 

Armonia dintre mentalitãti si cunostinte presupune ca aceste

cunostinte sã fie inteligibile, pe înteles. Dar mai poate exista

comprehensibilitate în era big-bang -ului disciplinar si a

specializãrilor excesive?

 

Un Pico de la Mirandola este de neconceput în epoca noastrã. Chiar

si unui specialist îi vine astãzi greu sã înteleagã rezultatele obtinute

de alt specialist din aceeasi disciplinã. Lucrul acesta nu este

monstruos în mãsura în care progresul respectivei discipline se

datoreazã inteligentei colective a comunitãtii atasate acesteia si

nu doar unui singur creier care, fatalmente, ar trebui sã cunoascã

toate rezultatele obtinute de toti colegii-creiere, ceea ce este

imposibil. Cãci astãzi existã sute de discipline. Cum ar putea oare

dialoga cu adevãrat, astãzi, un fizician teoretician al particulelor cu

un neurofiziolog, un matematician cu un poet, un biolog cu un

economist, un politician cu un informatician, dincolo de niste

generalitãti mai mult sau mai putin banale ? Si totusi, un adevãrat

factor de decizie ar trebui sã poatã dialoga cu toti deodatã. Limbajul

disciplinar este un obstacol aparent de netrecut pentru un neofit.

Iar noi, toti, suntem neofitii altora. Turnul lui Babel este oare

inevitabil?

 

Cu toate acestea, un Pico de la Mirandola al vremurilor noastre

poate fi conceput sub forma unui supercalculator în care s-ar putea

injecta toate cunostintele din toate disciplinele. Acest supercalculator

ar putea sti totul si nu ar pricepe nimic. Nici utilizatorul acestui

supercalculator nu s-ar afla într-o situatie mai bunã. El ar avea acces

instantaneu la orice rezultat din oricare disciplinã, dar ar fi incapabil

sã-i priceapã semnificatiile si cu atît mai putin sã facã legãturile între

rezultatele diferitelor discipline.

 

Acest proces de babelizare nu poate continua fãrã a ne primejdui

propria existentã, cãci astfel un factor de decizie ar deveni, fãrã

voie, din ce în ce mai incompetent. Sfidãrile majore ale epocii

noastre, cum ar fi de exemplu cele de ordin etic, reclamã din ce

în ce mai multe competente. Numai cã suma celor mai buni

specialisti în domeniile lor respective nu poate, evident, sã dea

nastere decît unei incompetente generalizate, fiindcã suma

competentelor nu este competenta : în plan tehnic, intersectarea

diferitelor domenii ale cunoasterii este o multime vidã. Ori, ce

înseamnã factor de decizie, fie el individual ori colectiv, dacã nu

acel factor capabil sã ia în consideratie toate datele problemei

examinate?

 

Nevoia stringentã de punti între diferitele discipline s-a concretizat

prin aparitia, cãtre mijlocul secolului al XX-lea, a pluridisciplinaritãtii

si a interdisciplinaritãtii.

 

Pluridisciplinaritatea se referã la studierea unui obiect dintr-una si

aceeasi disciplinã prin intermediul mai multor discipline deodatã.

De exemplu, un tablou de Giotto poate fi studiat din perspectiva

istoriei artei intersectatã de aceea a fizicii, chimiei, istoriei religiilor,

istoriei Europei si geometriei. Sau, filosofia marxistã poate fi studiatã

din orizontul filosofiei încrucisat cu acela al fizicii, economiei,

psihanalizei ori literaturii. Obiectul va iesi astfel mai îmbogãtit în

urma încrucisãrii mai multor discipline. Cunoasterea obiectului

obtinutã în cadrul propriei discipline de studiu este adîncitã de un

aport pluridisciplinar fecund. Cercetarea pluridisciplinarã aduce un

plus disciplinei în cauzã (istoria artei sau filosofia în exemplele de

mai sus), dar acest "plus" se aflã în slujba exclusivã a disciplinei

respective. Cu alte cuvinte, demersul pluridisciplinar se revarsã

peste limitele disciplinelor dar finalitatea sa rãmîne înscrisã în cadrul

cercetãrii disciplinare.

 

Interdisciplinaritatea are o altã ambitie, diferitã de aceea a

pluridisciplinaritãtii. Ea se referã la transferul metodelor dintr-o

disciplinã într-alta. Se pot distinge trei grade de interdisciplinaritate:

a)   un grad aplicativ. De pildã, metodele fizicii nucleare transferate în

medicinã duc la aparitia unor noi tratamente contra cancerului;

b)   un grad epistemologic. De exemplu, transferul metodelor logicii

         formale în domeniul dreptului genereazã analize interesante în

epistemologia dreptului;

c)    un grad generator de noi discipline. De exemplu, transferul

metodelor matematicii în domeniul fizicii a generat fizica

matematicã, al metodelor din fizica particulelor în astrofizicã

a dat nastere cosmologiei cuantice, al matematicii în studierea

fenomenelor meterologice sau de bursã a generat teoria haosului,

al informaticii în artã a dus la arta informaticã. Ca si

pluridisciplinaritatea, interdisciplinaritatea debordeazã limitele

disciplinei însã finalitatea sa rãmîne de asemenea înscrisã în

cercetarea interdisciplinarã. Prin al treilea grad al sãu,

interdisciplinaritatea contribuie chiar la big-bang -ul disciplinar.

 

Transdisciplinaritatea priveste - asa cum indicã prefixul "trans"

-       ceea ce se aflã în acelasi timp si între discipline, si înãuntrul

diverselor discipline, si dincolo de orice disciplinã. Finalitatea ei

este întelegerea lumii prezente, unul din imperativele sale fiind

unitatea cunoasterii.

 

Dar existã oare ceva între, în si dincolo de discipline? Din punctul

de vedere al gîndirii clasice, nu existã nimic, cu strictete nimic.

Spatiul în cauzã este vid, complet vid, ca vidul fizicii clasice. Chiar

renuntînd la viziunea piramidalã a cunoasterii, gîndirea clasicã

considerã cã fiecare fragment al piramidei, generat de big-bang

-ul disciplinar, este o piramidã întreagã; fiecare disciplinã afirmã

cã domeniul pertinentei sale este inepuizabil. Pentru gîndirea clasicã,

transdisciplinaritatea este o absurditate cãci nu are obiect.

In schimb, pentru transdisciplinaritate, gîndirea clasicã nu este

absurdã dar cîmpul sãu de aplicatii este considerat restrîns.

 

In prezenta mai multor niveluri de Realitate, spatiul dintre discipline

si de dincolo de discipline este plin, asa cum vidul cuantic este plin

de toate potentialitãtile : de la particula cuanticã la galaxii, de la

cuarc la elementele grele ce conditioneazã aparitia vietii în Univers.

 

Structura discontinuã a nivelurilor de Realitate determinã structura

discontinuã a spatiului transdisciplinar care, la rîndul sãu, explicã de

ce cercetarea transdisciplinarã este radical distinctã de cercetarea

disciplinarã, fiindu-i totodatã complementarã. Cercetarea disciplinarã

se referã cel mult la unul si acelasi nivel de Realitate; de alfel, cel

mai ades, ea se referã doar la fragmente ale unuia si aceluiasi nivel

de Realitate. ën schimb, transdisciplinaritatea se preocupã de

dinamica provocatã de actiunea simultanã a mai multor niveluri de

Realitate. Descoperirea acestei dinamici trece în mod necesar prin

cunoasterea disciplinarã. Transdisciplinaritatea, fãrã a fi o nouã

disciplinã ori o nouã superdisciplinã, se nutreste din cercetarea

disciplinarã care, la rîndul sãu, este limpezitã într-o manierã nouã si

fertilã de cunoasterea transdisciplinarã. ën acest sens, cercetãrile

disciplinare si transdisciplinare nu sunt antagoniste ci

complementare.

 

Cei trei stîlpi ai transdisciplinaritãtii - nivelurile de Realitate, logica

tertului inclus si complexitatea - determinã metodologia cercetãrii

transdisciplinare.

 

Existã un paralelism izbitor între cei trei stîlpi ai transdisciplinaritãtii

si cele trei postulate ale stiintei moderne.

 

Cele trei postulate metodologice ale stiintei moderne au rãmas

neschimbate de la Galilei pînã astãzi, în ciuda infinitei diversitãti a

metodelor, teoriilor sau modelelor ce au strãbãtut istoria diferitelor

discipline stiintifice. O singurã stiintã satisface însã deplin si integral

cele trei postulate: fizica. Celelalte discipline stiintifice nu le satisfac

decît partial. Cu toate acestea, absenta unei formalizãri matematice

riguroase a psihologiei, istoriei religiilor ca si a multor altor discipline

nu duce la eliminarea acestor discipline din cîmpul stiintei. Pînã si

stiinte de vîrf, cum este biologia molecularã, nu pot pretinde, cel

putin pînã în acest moment, cã ar poseda o formalizare matematicã

la fel de riguroasã ca aceea a fizicii. Altfel spus, existã grade de

disciplinaritate în functie de modul în care sunt luate în seamã, mai

mult sau mai putin complet, cele trei postulate metodologice ale

stiintei moderne.

 

La fel, luarea în considerare, într-un mod mai mult sau mai putin

complet, a celor trei stîlpi ai cercetãrii transdisciplinare determinã

diferite grade de trandisciplinaritate. Cercetarea transdisciplinarã

corespunzînd unui anume grad de transdisciplinaritate, se va apropia

mai degrabã de multidisciplinaritate (ca în cazul eticii); cea

corespunzînd altui grad se va apropia de interdisciplinaritate

(ca în cazul epistemologiei); iar cea corespunzînd altui grad

- de disciplinaritate.

 

Disciplinaritatea, pluridisciplinaritatea, interdisciplinaritatea si

transdisciplinaritatea sunt cele patru sãgeti ale unuia si aceluiasi arc:

cel al cunoasterii.

 

Ca si în cazul disciplinaritãtii, cercetarea transdisciplinarã nu este

antagonistã ci complementarã cercetãrii pluri si interdisciplinare.

Transdisciplinaritatea este cu toate acestea radical deosebitã de pluri

si interdisciplinaritate prin finalitatea sa - întelegerea lumii prezente-,

finalitate ce nu se poate înscrie în cercetarea disciplinarã. Finalitatea

pluri si interdisciplinaritãtii este întotdeauna cercetarea disciplinarã.

Dacã transdisciplinaritatea este atît de frecvent confundatã cu

interdisciplinaritatea si pluridisciplinaritatea (cum de altfel si

interdisciplinaritatea este deseori confundatã cu

pluridisciplinaritatea), aceasta se explicã în cea mai mare parte prin

faptul cã toate trei debordeazã limitele disciplinelor.

Aceastã confuzie este foarte nocivã în mãsura în care ea oculteazã

finalitãtile diferite ale acestor trei noi abordãri.

 

Chiar recunoscînd caracterul radical distinct al transdisciplinaritãtii în

raport cu disciplinaritatea, pluridisciplinaritatea si

interdisciplinaritatea, ar fi totusi extrem de periculos sã se

absolutizeze aceastã distinctie deoarece într-un asemenea caz

transdisciplinaritatea ar rãmîne golitã de întregul sãu continut iar

eficacitatea actiunii sale ar fi redusã la zero.

 

Caracterul complementar al modurilor de cunoastere disciplinare,

pluridisciplinare, interdisciplinare si transdisciplinare este pus în

evidentã cu fortã în cazul acompanierii muribunzilor. Aceastã

abordare relativ recentã în civilizatia noastrã este de o extremã

însemnãtate deoarece recunoscînd rolul pe care îl joacã moartea

noastrã în propria noastrã viatã, descoperim dimensiuni nebãnuite

ale vietii însesi. Acompanierea muribunzilor nu se poate lipsi de o

gîndire transdisciplinarã în mãsura în care întelegerea lumii prezente

este conditionatã de întelegerea sensului vietii noastre si al mortii

noastre în aceastã lume a noastrã.

 

 

traducere de Horia Vasilescu, editie ingrijita de Magda Cãrneci

 

 

Basarab Nicolescu

Centre International de Recherches et Études Transdisciplinaires / CIRET

http://perso.club-internet.fr/nicol/ciret/ro/visionro.htm

http://perso.club-internet.fr/nicol/ciret/

E-mail : nicol@club-internet.fr

 

 

 

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